Allain leprest

J'étais un gamin laid

Allain leprest
J'étais un gamin laid
Qui serrait des cailloux
Dans sa main sans ami
Sale comme un balai
Gonflé comme un biniou
De gros mots et de bruits
Avec un pansement
Que j'appelais maman
Les jours de pas de chance
Un grand sabre en papier
Au ciseau découpé
Dans un Huma-Dimanche

J'étais un jeudi vide
Qui léchait des carreaux
Aux lucarnes des chambres
Sur des feuilles humides
Plongeant son coeur idiot
En habit de scaphandre
Papa s'appelait papa
La rue s'appelait pas
Elle venait toute seule
Lancer sous la fenêtre
Quelques refrains à naître
Des taches plein la gueule

J'étais un gamin vert
Arrivé en soucoupe
Dans un hôtel du Nord
Dix ans après la guerre
Deux heures avant la soupe
Trop tôt avant sa mort
Coulé dans le ciment
Coincé dans ses volières
Qu'on tresse pour vriller
Héréditairement
Aux saisons ouvrières
Les enfants d'ouvriers

Et ce que je raconte
Dans tout ce qui remonte
C'est peut-être pas vrai
Je suis né au hasard
Nu dans la même gare
D'où je repartirai
Sans avoir jamais su
Si j'étais attendu
Si j'ai fait bonne route
Si j'étais un pékin
Qui attendait quelqu'un
Sans que quelqu'un s'en doute

Sans avoir jamais su
Si j'étais attendu
Si j'ai fait bonne route
Si j'étais un pékin
Qui attendait quelqu'un
Sans que quelqu'un s'en doute

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