Dans le métro
Debout sur le zincUn sourire ou trois sous, de l'amour ou un toit,
Perdu dans sa misère il ne parle plus,
Quitté par la colère sa haine s'est perdue.
Son coeur a l'amertume d'une vie pleine de guerre
Qui doucement le consume jusqu'à le mettre sous terre
Sous terre ou sous un tas d'ordures ménagères
Que l'on n'emportera pas dans le luxe d'un cimetière
Parfois un voyageur a l'allure impeccable
Toise l'enfant d'malheur comme pour lui dire « dégage »
Il pense qu'il faudrait que cette race de rien
Soit réduite a néant pour dégager son chemin.
Reviens,
C'est un homme comme toi,
Alors reviens,
Donne-lui un semblant de vie,
Mais reviens,
Tu pourrais vivre à sa place,
Alors reviens, reviens, reviens
Celui-là chante faux le seul air qu'il connaît
Dans la rame d'un métro, hiver comme été,
Pour public les badauds revenants de travailler,
Aigris de leur boulot, qui ne pensent qu'à rentrer.
Sa vieille voix fatiguée fait deux fois son âge,
Ses mains tentent de mimer l'histoire d'un partage
Auquel il ne croit plus, qui n'existe plus,
Auquel il a cru et qu'il a perdu.
A un mètre de lui un étudiant grande gueule
Parle fort et puis rit, se foutant bien d'sa gueule,
Pour séduire une fille toute fraîche et jolie
Qu'on pourrait croire gentille mais qui rit autant que lui.
Tais-toi,
C'est un homme comme toi,
Alors tait-toi,
Donne-lui une once de talent,
Mais tais-toi,
Tu gueule plus faux que lui,
Alors tais-toi
Et moi je reste là muet les yeux baissés,
Honteux de ne rien donner, honteux de n'pas parler.
J'aimerais crever ce mal en commençant par là
Hélas je reste là muet les yeux baissés.
Puis mon regard se tourne vers les parois voûtées
Où pour un temps séjournent les grandes publicités
La vie y semble belle, et tout le monde est beau.
A quel monde dois-je croire ?
Auquel vaut-il mieux croire ?