Serge lama

L'orphelin

Serge lama
Je suis orphelin de père et de mère connus
Dans aucun des deux, jamais, je ne me suis reconnu
Mais bien qu' je sois pas d' la même graine
Ben, je les aime bien quand même

J'aime papa, maman, cousin François, tante Albertine
Grand-mère Augusta qui faisait si bien la cuisine
Mémé chiffon qui faisait l' ménage pour trois francs d' l'heure
Grand-père le zouave qui lutinait la main d' ma sœur
J'aime papa, maman, tonton Julien et même en prime
Tous les amoureux de c'te sacrée tante Albertine
J'ai tout aimé de c' qu'on m'a forcé à aimer
Même que j'avoue modestement,
Comme disait l' curé de maman,
Que je m'aime bien de temps en temps

Je suis orphelin de père et de mère tradition
Qui ont toujours eu peur que j' fasse un jour honte à leur nom
Bien que j'aie changé mon nom d' baptême
Ben, je les aime bien quand même

J'aime papa, maman, cousin François, tante Albertine
Grand-mère Augusta qui faisait si bien la cuisine
Mémé chiffon qui faisait l' ménage pour trois fois rien
Grand-père le zouave qui avait fait la guerre du Tonkin
J'aime papa, maman, tonton Julien et même en prime
Tous les amoureux de c'te sacrée tante Albertine
J'ai tout aimé de c' qu'on m'a forcé à aimer
Même que j'avoue modestement,
Comme disaient les profs à maman,
Que je n' serai jamais Montherlant

Je suis orphelin de père et de mère malheureux
Qui n'ont pas eu d' pot d' mettre au monde un canard boiteux
Et bien qu' je sois d'une autre graine
Eh bien, ils m'aiment bien quand même

Tous, papa, maman, cousin François, tante Albertine
Grand-mère Augusta qui m' faisait si bien la cuisine
Mémé chiffon qu'est morte, un soir, d'un lumbago
Grand-père le zouave qui est mort un soir dans un bistro
J'aime papa, maman, tonton Julien et même en prime
Tous les amoureux de c'te sacrée tante Albertine
J'ai tout aimé de c' qu'on m'a forcé à aimer
Même que j'avoue modestement,
Comme disait mon père à maman,
"Y vaut rien mais c'est notre enfant"

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