Coup de foudre
Debout sur le zincJ'étais à pied, je ne comptais plus les gouttes
Perdu dans mes pensées en chemin,
J'ai pris le rallongi du destin.
Bien trop trempé pour pouvoir continuer
À la première porte je choisis de toquer
Cherchant juste une âme charitable
Un p'tit bout de pain au coin d'une table
Quand enfin fût tirée la bobinette
Et qu'un chat noir entre mes jambes eût passé
Que de la porte à peine entrouverte
J'entendis mon hôte me questionner
Je perçus tout d'abord comme un cantique
Une voix de femme comme on en fait plus
Puis une question d'ordre plus pratique
Que voulez-vous à cette heure indue ?
Jamais non jamais à cette porte je n'aurais du frapper
Si je pouvais tout changer
Je s'rais chez moi seul sous ma couette dans mon lit douillet
Je mis bien des secondes à lui répondre
Tant cette voix me fit l'effet d'un baiser
Tant l'instant assommait ma faconde
Tant ma bouche partait pour balbutier
Puis retrouvant la maîtrise de mes babines
Cherchant en moi l'éloquence d'un roi
Je lui répondis d'une voix câline
Je suis perdu trempé aidez-moi
Jamais non jamais à cette porte je n'aurais du frapper
Si je pouvais tout changer
Je s'rais chez moi seul sous ma couette dans mon lit douillet
Car?
Sûrement surprise par l'audace d'une telle demande
Elle ouvrit sa porte et me chanta « suivez-moi »
Maintenant pourvu de son offrande
J'entrai puis lui enquillai le pas
Je la suivis dans un petit couloir sombre
Où sa silhouette telle la plus belle des ombres
Flottait devant mes yeux médusés
Je sentais mes jambes vaciller
Jamais non jamais à cette porte je n'aurais du frapper
Si je pouvais tout changer
Je s'rais chez moi seul sous ma couette dans mon lit douillet
Une fois assis tout près de la cheminée
Près d'une table où elle s'était installée
Je découvris pour la première fois
Son visage, son corsage, oulala !
Elle me parlait mais je ne l'entendais pas
J'étais mouillé mais qu'es-ce que je m'en foutais
Tout mon or aujourd'hui je donnerais
Pour qu'ici l'histoire fût achevée
Retrouvant mes facultés auditives
Je compris fort gêné qu'elle me proposait
Comme elle le faisait pour ses convives
De m'aider à me débarrasser
Hélas sous l'effet de l'humidité
Mon pardessus avait bien sûr rétrécis
On eut bien du mal à les enlever
Et commencèrent les acrobaties
Elle tirait si fort sur mes manches que tout finit par lâcher
Et me voilà moitié nu
Devant la belle qui trébucha et tomba dans mes bras
Mais
Sous l'émotion mon coeur lui aussi lâcha
Comme foudroyé par une flèche trop acérée
Son bouche à bouche aggrava mon cas
Bien mort je vis mon âme s'envoler
Depuis ce jour sur mon nuage adopté
Il pleut des larmes sur la maison adorée
Il fait orage quand elle est amoureuse
Et beau temps quand elle est malheureuse