Le veilleur de nuit
Adolphe bérardDes bijoux scintillants que les écrins recèlent
Emeraudes, rubis, saphirs et diamants
C'est la fête des yeux, c'est un enchantement
Quand vient le soir, sur ces richesses
Le rideau de fer se baisse
Et le veilleur de nuit, seul dans l'obscurité,
Garde le trésor convoité
Il est deux heures du matin
Et dans la rue, pas un murmure
Qu'est-ce donc ? Le veilleur soudain
Entend qu'on force la serrure
La porte s'ouvre doucement
Un par un, trois hommes se glissent
Ils vont silencieux, rampant
Parmi les ténèbres complices
Et le veilleur de nuit
Caché dans un coin sombre
Voit tout à coup des ombres
S'avancer près de lui
Il fait feu, brandissant son arme
Une chute, un cri de douleur,
Le vieux hurle ces mots "Voleurs ! Voleurs ! Voleurs !"
Et l'écho de la nuit porte ce cri d'alarme
Deux des fripons se sont enfuis
Le vieux fait jaillir la lumière
Un homme est là, le front rougi
Par une balle meurtrière
Il s'approche. Horreur ! C'est son fils qui,
Pour aller vivre sa vie,
Quitta sa famille jadis
Voleur, lui ? Quelle infamie !
Et le veilleur de nuit,
Soudain la mine sombre,
Voit de lugubres ombres
Danser autour de lui
L'œil hagard et l'âme meurtrie
Tenaillé d'atroces douleurs
Il pleure, il chante, il crie
"Voleurs ! Voleurs ! Voleurs !"
Et l'écho de la nuit
Répète sa folie